Slameur en 10 jours !
Par: Aida Toye, Assistant Lien et Apprentissage, Voice au Niger, Oxfam
Pour les membres de l’équipe de l’ONG GONI, le slam vient naturellement. Il leur suffit d’y penser et les mots arrivent d’eux même! Normal, après tant d’années d’expérience.
Mais imaginez nos slameurs en herbe, qui côtoient la rime pour la 1ère fois…
L’ONG GONI dont le projet sous financement Voice est « A toi la parole », a pour mission de former des personnes handicapées aux techniques de Slam et à la prise de parole en public. Il s’agit d’opérer dans 15 quartiers sur les 15 mois que durera le projet.
Des ateliers de formations qui durent chacun 10 jours sont organisés, pendant lesquels 10 personnes handicapées, femmes et hommes, sont initiées à la création de slam dans lesquels ils racontent leur vécu et parlent de leurs plus grandes peines.
Lors de la première séance de restitution des 10 jours de formation organisée dans la cour de l’école public du quartier 1 (Lazaret), il était difficile de croire que certains des slameurs n’avaient qu’uneexpérience de 10 jours en la matière, tant leurs textes et leur technique étaient bons. Pendant les 2 ou 3 minutes qui leur étaient allouées, chacun d’entre eux a tenu l’assistance en haleine. Chaque slameur s’est exprimé dans sa langue maternelle. Cettesemaine, nous vous présentons 5 de ces personnes devenues «slameurs en 10 jours»!
Voici leurs textes (en français)
Texte de Mariama (Djerma): Un être handicapé (physique), N’est pas exempt de facultés.
Un être handicapé (physique),
N’est pas exempt de facultés.
Respecte-toi,
Et les autres te respecteront.
Une infirmité,
N’est pas la fin de tout.
Ne te laisse pas aller au désespoir,
Sous prétexte que tu es handicapé.
Respecte-toi,
Et les autres te respecteront.
Même infirme,
Tu as plein de potentialités,
Dont pourront bénéficier les autres.
Ton handicap ne doit pas t’empêcher de travailler,
Pour toi.
Fais-le pour toi.
Bats-toi pour toi.
Ne tend pas la main.
Toi le handicapé,
Respecte-toi.
Ressaisis-toi.
Bats-toi contre la saleté.
Un être handicapé (physique),
N’est pas exempt de facultés.
Respecte-toi,
Et les autres te respecteront.
Texte d’Ali Seyni (Djerma): Ce qui nous manque nous attire !
Ce qui nous manque nous attire!
Si j’avais des pieds,
Je m’achèterai des chaussures.
Si j’avais des pieds,
Je serais un soldat pour servir mon pays.
Si j’avais des pieds,
Je serais un lutteur qui lutterait pour avoir le sabre.
Ce qui nous manque nous attire!
Si j’avais des pieds,
Je courrai dans tous les sens.
Mais hélas je n’en ai pas…
Même si je cours,
Je n’irais pas loin.
Ce qui nous manque nous attire!
Texte de Issa (Djerma) : Mon travail, Ma fièrté
Mon travail, Ma fierté.
Grâce à lui, à mon travail, la mendicité s’est éloignée.
Je ne tends plus la main
Je ne dépends de personne.
Mon travail, Ma liberté.
Mes problèmes sont résolus.
Mon travail, Ma perche.
Mon travail, Ma fierté.
Il m’a permis d’aider d’autres handicapés,
A travailler.
Mon travail, Ma fierté
Pour mes parents,
Pour ma famille.
Mon travail, Ma fierté!
Texte d’Issoufou Abdoulaye (Djerma): Sur mon vélo je me sens à l’aise
Quand je suis sur mon vélo,
Je me sens à l’aise,
Car je peux aller où je veux,
Faire ce que je veux.
Dans ma situation j’ai vu l’amour et le mépris.
Par cet amour, j’ai fait tomber un truc et on me l’a remis.
Par cet amour, j’ai trébuché on m’a tendu la main, on m’a posé sur un vélo.
Et par cet amour les miens m’ont apporté secours.
Cet amour réconfortant.
Pendant que j’étais à l’aise sur mon vélo,
Mon rêve se brisa quand mon vélo tomba en panne.
Ce jour j’ai connu le mépris,
Car sans le savoir, les gens m’ont pointé du doigt.
Et ils disent « regardez ce gaillard qui s’est fait porter au dos ».
Et cet acte m’a brisé le cœur car je n’avais jamais été traité de la sorte.
Ce mépris je ne l’oublierais jamais.
Dans ma situation j’ai vu l’amour et le mépris.
Texte de Seydou (Djerma): Tous les hommes sont égaux
Tous les hommes sont égaux,
Sauf celui qui ne te plait pas.
Mes amis, mes proches, ne m’ont pas dédaigné.
Ils m’ont donné confiance en moi.
Ils m’ont fait oublier mon handicap.
Leur comportement et leur humanité,
Ont facilité ma vie de tous les jours,
Ont rendu mon monde meilleur.
Ils m’ont donné l’orgueil pour bomber le torse,
Ils m’ont donné le courage de lutter.
Tous les êtres, hommes comme femmes, sont égaux,
Sauf celui que tu récuses,
Celui que tu rejettes,
Même si c’est ton voisin, tu le combattras.
Celui que tu aimes,
Même s’il te vilipende,
Tu ne le mépriseras pas.
Celui qui ne te déprécie,
Ne trouvera aucune auréole.
Celui qui t’aime
T’affectionnera même fou.
