De la protection et des poursuites
La loi, une arme à double tranchant
Par Wendy Otieno, chargée de lien, apprentissage et amplification Voiceau Kenya et en Tanzanie et Emmanuel Waisai, chargé de programme de Voice en Tanzanie, Hivos East Africa.
Peu avant les élections générales de 2015 en Tanzanie, la loi sur la cybercriminalité a été déposée devant le Parlement national de Tanzanie. Elle a été présentée comme un projet de loi sous certificat d’urgence. Il convient de noter que la liberté d’expression est un droit constitutionnel ainsi qu’un droit humain fondamental. La loi était censée aboutir à une meilleure réglementation et créer une plus grande sécurité en ligne pour les citoyens ordinaires, réduisant ainsi l’autocensure afin de mieux équilibrer les intérêts entre les droits de l’homme et la nécessité de contrôler la société. Dans certains cas, cependant, il semble que la loi soit devenue un obstacle plutôt qu’un moyen d’action. Dans quelques cas, elle a même été utilisée comme un outil pour restreindre la liberté d’expression, notamment pour poursuivre les personnes qui critiquent les hauts fonctionnaires sur les plateformes de médias sociaux.
Plusieurs pétitions ont été déposées devant la Haute Cour de Tanzanie pour contester certains articles de la loi qui violent la Constitution, notamment en ce qui concerne la liberté d’expression. C’est notamment le directeur exécutif de Jukwaa La Katiba, Bob Chacha Wangwe, qui a déposé une pétition devant la Haute Cour. Jukwaa La Katiba est un bénéficiaire d’une subvention de Voice Tanzania influencing dont le projet renforce la capacité de la société civile à défendre les droits démocratiques garantis par la Constitution.
Vous trouverez ci-dessous une vidéo de Bob (en kiswahili) parlant de cette question sur l’une des chaînes de télévision locales.
En 2016, Bob a été arrêté pour « publication de fausses informations » en vertu de l’article 16 de la loi de 2015 sur la cybercriminalité. Malgré les nombreux revers, il a pu gagner son appel des accusations qui lui avaient été opposées et qui lui ont coûté des milliers de shillings. Lisez ici l’histoire complète de son calvaire dans un article capturé par Human Rights Watch.
Il n’en était pas à son premier coup d’essai pour contester la censure systématique que le gouvernement continue d’imposer, compte tenu d’autres politiques restrictives. Bob et Raymond, un autre militant des droits de l’homme, se dirigent maintenant vers la Cour d’appel pour contester la décision favorable au Procureur général. Leur pétition visait à contester les sections 16 et 39 de la loi sur les cybercrimes, qui portent atteinte à la liberté d’expression et au droit à la vie privée consacrés par les articles 15, 17 et 18 de la Constitution tanzanienne.
Il n’y a pas de plus grande urgence que maintenant pour que cette pétition fasse l’objet d’un nouvel appel. Comme on l’a vu lors des récentes élections d’octobre 2020, le droit des citoyens à la liberté d’expression et leur capacité à critiquer le gouvernement ne sont pas encore une réalité. Par exemple, le pays a connu une coupure d’Internet pendant la période électorale, limitant ce que les citoyens pouvaient partager en ligne. Alors que l’espace démocratique continue de se rétrécir en Tanzanie, le pays a besoin de plus de jeunes volontaires comme Bob qui sont prêts à faire pression pour un changement positif – en utilisant la loi.