En cette matinée d’octobre 2019, nous étions réunis dans une salle immense, celle où nous organisions le Kakakin Voice, la foire aux talents du Niger. Les senteurs agréables de l’encens d’une femme transformatrice de produits agroalimentaires enrobaient la salle, les articles en couleurs des femmes artisanes donnaient presque l’impression que se dessinait un arc en ciel. Marilou, maitresse de cérémonie improvisée le jour même, cheffe de projet éloquente et confiante, annonce l’entrée de jeunes danseurs pour présenter une chorégraphie. Sans en dire plus. Suspens ! Cette activité qui était entièrement organisée par les membres de plusieurs organisations partenaires de Voice au Niger, allait faire se succéder les talents dont regorgent les détenteurs de droits. Bien qu’étant une des instigatrices de l’évènement, je n’avais pas pu assister aux répétitions finales la veille. Je me tenais au fond de la salle et je me trouvais à être aussi impatiente que toute l’assistance, que les jeunes danseurs annoncés fassent leur entrée.
Je croyais cependant avoir l’avantage de savoir que les jeunes qui allaient faire une chorégraphie devant nous étaient tous malentendants et sourds. Ce que je ne savais pas, c’était le degré auquel ils avaient maitrisé les pas de danse et le fait qu’ils pouvaient, bien qu’ils n’entendaient pas la musique, danser au rythme de celle-ci et être les uns en accord avec les pas des autres. La chorégraphie ne dura pas plus de 2 minutes, puis, individuellement, chacun des danseurs se rapprocha du public pour danser sur les pas qu’il maitrisait le mieux. A chaque instant que la musique jouait, je ressentait la fierté et mes émotions, mitigées, passaient de la joie à la mélancolie puis encore la joie et la fierté. C’était juste extraordinaire à voir ! mon émotion a atteint son paroxysme en voyant la réaction du public lorsque notre maitresse de cérémonie a annoncé, à la fin de la performance « Ces jeunes danseurs sont sourds ». Ils applaudissaient en langue des signes ! C’était just Magique !