Plaidoyer pour la limitation des mandats en Afrique

De la prison au podium : l’évolution de Tournons la Page au Niger

Par Laurent Duarte et Maikoul Zodi, Tournons La Page et Aida Toye, Assistante Lien et Apprentissage, Voice, Oxfam au Niger

Le sommet sur le constitutionnalisme et la limitation des mandats présidentiels s’est tenu à Niamey du 2 au 4 octobre 2019. Initié par NDI (National Democratic Institute) et ses partenaires, dont notamment OSIWA (Open Society Initiative for West Africa), l’organisation a retenu Tournons la page (TLP) comme partenaire du programme pour la tenue de cette 1^ère édition du sommet. Le sujet de ce sommet est surtout un défi pertinent en Afrique où au Tchad ou au Cameroun, les moins de 30 ans n’ont connu qu’un seul président !

Il s’agissait de réunir d’anciens chefs d’Etat, des leaders de la société civile et des professionnels des médias pour examiner la consolidation de la démocratie et le transfert pacifique du pouvoir en Afrique mais surtout en Afrique l’Ouest . Nicéphore Soglo du Benin, Goodluck Jonathan du Nigeria, Mahamane Ousmane du Niger, ainsi que, Catherine Samba Panza de la Centrafrique et Amos Sawyer du Liberia étaient invités à la rencontre.Et à leurs côtes et sur l’estrade les membres de Tournons La Page étaient bien visibles. Ceci est remarquable, sachant qu’il y a un an 27 membres de TLP au Niger ont étés emprisonnés pour avoir voulu exercer leur droit constitutionnel à manifester pacifiquement.

L’objectif de cette rencontre était de pouvoir ensemble réfléchir sur un guide stratégique et mettre en place des plaidoyers et des actions de mobilisations citoyennes sur la limitation des mandats. Ainsi, l’opportunité a été saisi par la société civile pour passer des messages auprès des anciens chefs d’Etat afin qu’il plaident auprès de leurs confrères pour le respect de la limitation des mandats par tous les dirigeants du continent.

Le président de la république du Niger, M. Issoufou Mahamadou, dans son discours d’ouverture, a affirmé qu’il respecterait la constitution et se limiterait à 2 mandats. « Je respecterai scrupuleusement les dispositions de la République du Niger. Mon désir le plus ardent est de passer le pouvoir en 2021 à un successeur démocratiquement élu, ce sera une première dans notre pays depuis son accession à l’indépendance » (source : https://www.bbc.com/afrique/region-49915861). Il a rajouté que « l’usure du pouvoir conduit souvent au despotisme ».

TLP a participé à l’organisation du sommet suite à une demande du NDI, pour représenter la société civile africaine aux côtés de 2 autres organisations, Africtivistes (bloggeurs) et Katiba Institute (collectif d’avocats institutionnalistes du Kenya). TLP Niger, appuyée par la coordination internationale de Tournons la Page, à travers son coordonnateur Laurent Duarte, a alors saisi l’opportunité pour s’exprimer sur le fait que la limitation des mandats est un filet de sécurité. C’est un des instruments à notre disposition pour faire avancer la démocratie. « Nous avons besoin de dirigeants redevables et ouverts à la critique ».

Les chefs d’Etat présents, au même titre que tous les autres participants, ont pris l’engagement au travers de « la déclaration de Niamey en faveur du constitutionnalisme pour la consolidation de la démocratie et le transfert pacifique du pouvoir » de :

Promouvoir et défendre les principes du constitutionnalisme, de l’Etat de droit et du respect de la limitation des mandats ;
Faciliter des transferts pacifiques du pouvoir
Encourager un consensus national et continental sur le respect des limites du mandat présidentiel

Il faut noter que Tournons la Page Niger, à travers son projet « Agir ensemble pour la justice fiscale, la redevabilité des dirigeants et la démocratie au Niger », financé par Voice au Niger sous la subvention d’influence, a déjà posé les jalons pour mener à bien des actions de plaidoyer qui contribueront à l’atteinte de l’objectif de ce sommet. En plus, Tournons la Page International met en oeuvre un projet intitulé Projet PROTECTION destiné à renforcer la protection des militants qui promeuvent les valeurs démocratiques dans les neuf pays africains concernés.

Ce sommet qui est un programme pilote, n’a concerné que l’Afrique subsaharienne. Une autre conférence est prévue prochainement à Nairobi au Kenya.

Victimes violations récurrentes de leurs droits depuis plusieurs années et notamment depuis un an et demi au Niger, voir un tel évènement se tenir à Niamey et aboutir à une déclaration forte en faveur de la limitation des mandats et de l’alternance est une victoire marquante pour TLP. Mais le chemin à parcourir pour un ancrage démocratique pérenne en Afrique est encore long et passe par des élections libres et des militants protégés. C’est ce que TLP a exprimé dans son communiqué du 7 octobre : http://tournonslapage.com/fr/content/seules-des-elections-libres-et-transparentes-peuvent-assurer-lavenir-democratique-en-afrique