Création d’organisations LGBTIQ+ dans les zones rurales des Philippines
« Que vous viviez à la campagne ou en ville, nous voulons que personne ne soit laissé pour compte », déclare Jap Ignacio, directeur de Babaylanes Inc. Cette ONG philippine aide les organisations LGBTIQ+ des zones rurales à se professionnaliser et à se développer, un projet rendu possible grâce au soutien de notre programme Voice.
Pendant la pandémie de COVID19, la discrimination contre les personnes LGBTIQ+ est devenue plus visible au publique, explique Jap Ignacio, directeur de Babaylanes Inc, partenaire de Voice aux Philippines. Les gens étaient plus actifs sur les médias sociaux, et davantage d’histoires et de vidéos ont été partagées sur l’intimidation et la violence.
Jap raconte qu’une vidéo est sortie montrant des femmes d’une communauté musulmane se faisant raser la tête parce qu’elles étaient (vraisemblablement) lesbiennes. Une autre a été diffusée sur Facebook, montrant des jeunes mineurs transgenres forcés de danser nus devant la police. Ils avaient été arrêtés pour avoir enfreint les règles de lockdown pendant la pandémie de corona. Aux Philippines, les mesures de confinement étaient extrêmement longues et strictes, et les gens n’étaient pas autorisés à quitter leur domicile. « Les membres de la communauté LGBTIQ+ ont été sévèrement punis pour le simple fait d’être ce qu’ils sont », explique Jap.
L’œuvre de Babaylanes
Babaylanes Inc. œuvre pour mettre fin à la discrimination et à la violence à l’encontre des jeunes LGBTIQ+ aux Philippines. Cette petite ONG a été fondée en 2008 et mène des recherches, entre autres, sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre. L’organisation promeut l’égalité des droits par la formation et le lobbying auprès du gouvernement. Elle forme également les entreprises à des politiques inclusives concernant les différentes orientations sexuelles et identités de genre des employés.
Babaylanes est également secrétaire général du Réseau LGBT Lagablab, une organisation qui fait pression pour une loi anti-discrimination LGBTIQ+. « Cela fait 22 ans que nous plaidons pour une loi de ce type. Le processus est difficile car le Sénat et le Congrès sont très conservateurs. Ce sont principalement des hommes hétéros machos qui ne veulent pas nous parler », explique M. Jap.
Construire des communautés arc-en-ciel
L’un des projets de Babaylanes Inc. que Hivos soutient par le biais du programme Voice est Building Rainbow Communities, un projet de trois ans qui a débuté en août 2021. Il se concentre sur les organisations LGBTIQ+ informelles des zones rurales plutôt que sur les organisations de Manille et de ses environs, qui ont reçu la plus grande attention jusqu’à présent. « À la campagne, ce ne sont souvent que des groupes d’amis informels qui ne savent pas comment s’organiser ou comment faire pression sur le gouvernement, explique M. Jap. « Ils ne savent pas non plus grand-chose de leurs droits ni de la signification exacte de termes comme orientation sexuelle et identité et expression de genre. »
Formation, développement organisationnel et lobbying
Babaylanes se concentre donc sur le renforcement et la professionnalisation de ces organisations. « Ce que nous voulons leur inculquer, c’est que la diversité doit être autorisée et que nous avons tous des droits. Que le gouvernement ne doit pas nous oublier dans la prise de décision et la conception des programmes. Nous donnons également des cours sur la santé et nous leur apprenons à faire face à la discrimination, à l’intimidation et à la violence », poursuit M. Jap.
Mon rêve est que notre société embrasse la diversité sexuelle et de genre.
Finalement, Babaylanes soutien ces organisations à définir leur mission, leur vision et leurs objectifs et à répondre aux exigences gouvernementales en matière de reconnaissance officielle. Elle leur fournit des outils pour entamer des discussions avec les autorités locales et plaider de manière convaincante en faveur de politiques plus inclusives ou d’une coopération dans les programmes locaux.
De 300 à 500 membres
Building Rainbow Communities existe depuis moins d’un an, mais Jap constate déjà des progrès. « Nous avons récemment rendu visite à l’une des organisations locales. Leurs effectifs sont passés de 300 à 500 membres depuis le début du projet. Ils sont même devenus plus importants que Babaylanes ! Ce projet leur a donné la confiance en soi nécessaire pour aborder les gens et parler de ce que leur organisation fait et pourquoi. »
Rêve pour l’avenir
Jap est activiste dans l’âme. Ce sont ses propres expériences qui lui donnent la force de se consacrer aux autres. « Ma mère a pleinement accepté mon orientation sexuelle. Elle m’a assuré qu’elle m’aimait quoi qu’il arrive, même après mon « coming out ». Elle est un merveilleux exemple de la façon dont tous les parents devraient réagir. Malheureusement, j’entends beaucoup d’histoires poignantes de parents qui rejettent leurs enfants à cause de ce qu’ils sont. Mon rêve est que tous les jeunes des Philippines puissent vivre la même expérience que celle que j’ai eue avec ma mère et que notre société accepte la diversité sexuelle et de genre. Et qu’un jour, une organisation comme Babaylanes Inc. ne sera plus nécessaire », sourit-il.
Publié d’abord sur Hivos.org